En 2008, Laurence G., une secrétaire générale de mairie, rejoint la commune de Sinceny (environ 2.200 habitants) sans se douter que son parcours professionnel serait bientôt marqué par une lutte acharnée pour faire valoir ses droits. Confrontée à une discrimination syndicale flagrante, Laurence a mené un combat de presque dix ans pour obtenir justice. Grâce à sa résilience, à son engagement et au soutien indéfectible de la FA-FPT, elle a fini par triompher en 2024, lorsque la Cour administrative d’appel de Douai a reconnu la faute de la commune de Sinceny. Voici l’histoire de son combat, une histoire de courage, de solidarité, et de victoire contre l’injustice.
Un parcours professionnel jalonné de défis
Le parcours de Laurence G. dans la fonction publique territoriale débute bien avant son arrivée à Sinceny. De février 1988 à juin 2007, elle travaille pour un SIVoM (Syndicat intercommunal à vocations multiples), où elle contribue à la création et à la gestion de cette structure avant de voir son poste disparaître lors de sa dissolution. En juillet 2007, elle se retrouve en surnombre sur une des communes membres de ce syndicat.
En février 2008, elle est mise à disposition du Centre de Gestion (CDG) de l’Aisne, effectuant un contrat de remplacement dans un autre EPCI (Établissement Public de Coopération Intercommunale) jusqu’en août. C’est à ce moment-là qu’elle est contactée par le maire de Sinceny pour un entretien en vue de remplacer la secrétaire de mairie qui allait partir à la retraite. Malgré ses réticences dues à son manque d’expérience en État civil et en urbanisme, elle accepte le poste. « J’avais négocié mes primes à l’identique de celles perçues au SIVoM, mais je ne me sentais pas à l’aise avec ce poste », se souvient Laurence. Le soutien de son mari Jacky, qui lui rappelle que la mairie est à seulement 10 minutes de chez eux, finit par la convaincre.
Cependant, les débuts sont difficiles. Laurence se retrouve face à des dossiers complexes qu’elle doit gérer avec peu de ressources. « Il n’y avait pratiquement pas d’archives pour m’éclairer, et je mettais plus de temps que ma prédécesseure à traiter les dossiers », explique-t-elle. Dans le cadre de ses fonctions, Laurence a constaté des éléments qui l’ont amenée à s’interroger sur la gestion financière de la mairie. Soucieuse de la bonne conduite des affaires publiques, elle a fait remonter ses observations, mais s’est heurtée à un certain immobilisme, ce qui a ébranlé sa confiance en ses collègues et les élus.
L’entrée dans le syndicalisme : Un tournant dans la carrière de Laurence
C’est en 2011 que Laurence croise la route d’Eric Tournemolle de la FA-FPT, un événement qui marquera un tournant décisif dans sa vie professionnelle. À cette époque, elle traverse une période de dépression due aux conditions de travail éprouvantes à Sinceny. « J’étais au plus bas, mais Eric m’a proposé de m’impliquer dans le syndicat. Au début, j’ai refusé, mais en mai 2011, j’ai accepté de faire un essai », raconte-t-elle.
À partir de septembre 2012, Laurence devient permanente au Syndicat Départemental de l’Aisne (SD 02) de la FA-FPT, cumulant décharges d’activité, autorisations spéciales d’absence (ASA), et congés. Cette nouvelle carrière lui permet de se reconstruire et de retrouver peu à peu confiance en elle. « Le syndicat m’a permis de reprendre pied, de me sentir utile et de retrouver ma dignité », confie-t-elle. Laurence s’investit profondément dans son rôle, assumant diverses responsabilités syndicales, notamment au sein du CDG 02, du Syndicat Départemental de l’Aisne et de l’Union Régionale des Hauts de France (UR HdF) de la FAFPT.
La discrimination syndicale : L’affaire de 2014
Le 1er septembre 2014, la situation professionnelle de Laurence prend une nouvelle tournure. Le maire de Sinceny recrute un attaché territorial, une décision qui aurait dû simplement compléter l’équipe. Cependant, en novembre de la même année, Laurence se voit retirer la Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI) de 30 points qu’elle percevait en tant que secrétaire générale de mairie d’une commune de 2 000 à 3 500 habitants. En parallèle, son Indemnité d’Exercice de Missions des Préfectures (IEMP) est réduite de manière drastique, passant de 93,25 € à 43,52 €.
Laurence perçoit rapidement cette décision comme une injustice, voire une discrimination liée à son engagement syndical. « Le maire m’a dit que c’était l’attaché qui percevait désormais la NBI, mais cela ne justifiait en rien la réduction de mon IEMP », se souvient-elle. Laurence se tourne alors vers la FA-FPT, qui privilégie d’abord la voie du dialogue avec le maire. Malheureusement, celui-ci repousse les rencontres, ignore les courriers et refuse toute communication. « Les deux mois de recours ont été dépassés à cause de son silence, mais un dossier a tout de même été déposé au Tribunal administratif d’Amiens », explique-t-elle.
Un parcours juridique semé d’embûches
Le premier recours déposé par la FA-FPT est rejeté par le Tribunal administratif d’Amiens en raison du dépassement du délai, sans que le fond de l’affaire ne soit examiné. Face à cette impasse, Laurence décide de saisir le Défenseur des droits à titre personnel, espérant ainsi obtenir une reconnaissance de la discrimination dont elle est victime.
En 2021, les recommandations de la Défenseure des droits tombent, reconnaissant la discrimination syndicale subie par Laurence et demandant au maire de Sinceny de corriger cette injustice. Mais, une fois de plus, le maire reste sourd à ces recommandations. Encouragée par la juriste de la Défenseure des droits, Laurence décide alors de monter un dossier pour discrimination syndicale avec l’aide de l’Avocat de l’Union Régionale des Hauts de France. « Nous avons déposé un nouveau recours devant le Tribunal administratif d’Amiens, qui a de nouveau rejeté l’affaire. Mais cette fois, nous n’avons pas abandonné et avons fait appel devant la Cour administrative d’appel de Douai », explique Laurence.
Un soutien syndical sans faille
Pendant toute cette épreuve, Laurence peut compter sur le soutien indéfectible de la FA-FPT. « Le syndicat a pris en charge les frais d’avocats pour les trois dossiers. Eric Tournemolle et Stéphane LESOT m’ont accompagnée jusqu’à la Cour administrative d’appel de Douai en juin 2024 », raconte-t-elle. Ce soutien est crucial, tant sur le plan moral que financier. « Sans la FA-FPT, je n’aurais jamais pu mener ce combat. Ils m’ont épaulée à chaque étape, même quand je perdais patience », confie Laurence.
La décision de la Cour administrative d’appel : Une victoire méritée
Le 4 juin 2024, après près de dix ans de bataille juridique, la Cour administrative d’appel de Douai rend sa décision : elle donne raison à Laurence. La Cour reconnaît la faute de la commune de Sinceny pour discrimination syndicale et ordonne le rétablissement de ses indemnités ainsi que le versement de 21 692 euros en réparation des préjudices subis. « J’ai accueilli cette décision comme une délivrance, une reconnaissance de l’injustice que j’avais subie », déclare Laurence avec émotion.
Cette victoire est non seulement une revanche personnelle pour Laurence, mais elle établit également une jurisprudence importante pour les agents territoriaux engagés syndicalement. « J’espère que ce jugement pourra servir d’exemple et protéger d’autres agents dans le futur », ajoute-t-elle.
Un message d’espoir pour les agents territoriaux
Aujourd’hui, Laurence souhaite transmettre un message d’espoir à tous les agents territoriaux qui pourraient se retrouver dans une situation similaire. « Je leur dirai de ne jamais abandonner, de persévérer et de se faire aider par le syndicat. Ensemble, on peut surmonter les épreuves les plus difficiles », affirme-t-elle.
Après cette victoire, Laurence continue de s’investir pleinement au sein de la FA-FPT, où elle joue un rôle clé dans la défense des droits des agents territoriaux. « Cette affaire m’a appris à ne jamais baisser les bras, même quand tout semble perdu. Aujourd’hui, je suis prête à continuer le combat pour aider les autres », conclut-elle.
Conclusion
L’histoire de Laurence G. est un témoignage puissant de résilience et de détermination. Malgré les obstacles, elle a su faire face à l’injustice avec courage, soutenue par la solidarité de la FA-FPT. Son combat, qui a finalement abouti à une victoire éclatante, rappelle l’importance du syndicalisme dans la protection des droits des agents territoriaux. C’est un message d’espoir et de persévérance pour tous ceux qui se battent pour la justice dans la fonction publique territoriale.