SOMMAIRE
Introduction
La retraite des assistants familiaux est une étape charnière qui nécessite une préparation minutieuse. Ce métier singulier, exercé dans un cadre parfois complexe entre le secteur public et le secteur privé, implique des spécificités administratives et légales qui peuvent sembler difficiles à appréhender.
En tant qu’assistant familial, vous êtes chargé d’accueillir des enfants ou des jeunes majeurs dans un cadre professionnel tout en offrant un environnement familial. Cette mission d’une grande importance s’accompagne d’un statut particulier, influençant directement les droits et modalités de votre retraite.
Ce guide complet vise à vous accompagner dans la préparation de votre départ à la retraite. Vous y trouverez des informations détaillées sur les régimes de retraite qui vous concernent, les étapes à suivre pour organiser votre départ, les options pour maximiser vos droits, ainsi que des éclairages sur les spécificités du cumul emploi-retraite. Nous aborderons également les démarches relatives à la pension de réversion pour les conjoints survivants.
Que vous soyez à l’aube de votre retraite ou que vous souhaitiez simplement anticiper cette étape, ce guide répondra à vos interrogations et vous permettra d’agir en toute sérénité.
Comprendre le système de retraite des assistants familiaux
Une double affiliation : régime général et complémentaire
Les assistants familiaux sont affiliés à deux régimes de retraite principaux :
- Le régime général de l’assurance vieillesse (CNAV/CARSAT) : Il couvre la retraite de base pour les salariés. La pension est calculée en fonction du nombre de trimestres validés, du salaire annuel moyen (calculé sur les 25 meilleures années), et de l’âge de départ.
- La retraite complémentaire IRCANTEC : Spécifique aux agents non titulaires des employeurs publics ou aux salariés des associations, ce régime permet d’ajouter des revenus supplémentaires à la pension de base.
Chaque trimestre travaillé et chaque point acquis dans ces deux régimes influencent directement le montant final de votre retraite.
Particularités liées au statut d’assistant familial
Employeurs privés
Pour les assistants familiaux employés par des associations ou autres structures privées, les règles de mise à la retraite suivent les dispositions du Code du travail. Les employeurs peuvent :
- Décider de votre départ à la retraite entre 65 et 69 ans, sans votre consentement.
- Vous mettre automatiquement à la retraite à partir de 70 ans.
Employeurs publics (départements)
Dans le cas où vous êtes employé par une collectivité territoriale (départements, communes, etc.), d’autres règles s’appliquent :
- La mise à la retraite est automatique à 67 ans.
- Une prolongation jusqu’à 70 ans est possible si vous en faites la demande. Ce dispositif, instauré par la réforme de 2022, permet de prolonger l’accompagnement d’un enfant ou jeune majeur. Cette prolongation est conditionnée par un avis médical favorable, renouvelable chaque année.
Différence entre retraite progressive et retraite complète
Les assistants familiaux ont intérêt à ne pas demander leur retraite tant qu’ils n’ont pas atteint le taux plein, c’est-à-dire :
- Le nombre requis de trimestres cotisés pour leur génération (166 trimestres pour ceux nés après 1955).
- Ou l’âge de 67 ans, qui garantit le taux plein automatique même sans le nombre suffisant de trimestres.
En effet, la liquidation d’une pension ne peut pas être révisée (sauf en cas de retraite progressive). Cela signifie qu’un départ anticipé pourrait entraîner une décote définitive, réduisant considérablement le montant de votre pension.
Quels impacts pour les assistants familiaux ?
Ce double régime, combiné à des règles spécifiques selon l’employeur, engendre des démarches plus complexes que dans d’autres professions. Pour bien comprendre vos droits et optimiser votre retraite :
- Consultez régulièrement votre relevé de carrière pour identifier d’éventuelles lacunes (périodes non prises en compte, erreurs dans les trimestres validés, etc.).
- Renseignez-vous sur les dispositifs particuliers comme le rachat de trimestres, abordé plus en détail dans les sections suivantes.
Préparer son départ à la retraite
Étapes essentielles pour une transition réussie
Création de vos comptes sur les plateformes officielles
- Inscrivez-vous sur lassuranceretraite.fr, le site officiel de la CNAV/CARSAT, pour gérer votre retraite de base. Vous pourrez y accéder à votre relevé de carrière, faire des simulations et suivre l’avancement de votre demande.
- Ouvrez un compte auprès de votre caisse complémentaire, comme l’IRCANTEC, pour vous assurer que vos points retraite sont correctement enregistrés.
Simulation de pension
Avant toute démarche définitive, réalisez une simulation sur le portail simulateur.info-retraite.fr. Ce calcul vous permettra :
- De connaître le montant estimé de votre pension.
- D’identifier si vous remplissez les conditions pour un taux plein.
- De déterminer la meilleure date de départ en fonction de vos besoins et de vos projets.
Vérification et mise à jour de votre relevé de carrière
La vérification de votre relevé de carrière est une étape clé. Ce document récapitule :
- Vos trimestres validés dans le régime de base.
- Vos points accumulés dans le régime complémentaire.
En cas d’erreurs (périodes manquantes, trimestres non comptabilisés), contactez rapidement les organismes concernés pour corriger ces anomalies.
Maximiser ses droits à la retraite
Obtenir une retraite à taux plein
La retraite à taux plein garantit que votre pension sera calculée sans décote. Deux conditions permettent d’y parvenir :
- Réunir le nombre de trimestres requis : 166 trimestres pour les personnes nées après 1955.
- Ou atteindre l’âge légal du taux plein : fixé à 67 ans. À cet âge, le taux plein est accordé automatiquement, même si vous n’avez pas validé tous vos trimestres.
Pourquoi éviter la décote ?
Partir avant d’avoir rempli ces conditions entraîne une réduction permanente de votre pension :
- La décote est de 1,25 % par trimestre manquant (jusqu’à 12 trimestres).
- Pour des périodes au-delà de 12 trimestres, la décote s’élève à 1,875 % par trimestre.
Rachat de trimestres : un outil stratégique
Qu’est-ce que le rachat de trimestres ?
Le rachat de trimestres permet de compenser des périodes incomplètes de carrière, comme :
- Les années où vous n’avez pas validé suffisamment de trimestres.
- Les interruptions pour raisons personnelles ou professionnelles.
Avantages pour les assistants familiaux
Pour les assistants familiaux ayant exercé avant 1990, un tarif préférentiel est proposé :
- 1 322 € par trimestre, soit une réduction de 75 % par rapport au coût standard.
- Possibilité de racheter jusqu’à 12 trimestres maximum.
Les bénéfices concrets du rachat
- Amélioration du montant de la pension : Chaque trimestre supplémentaire valide augmente la base de calcul de votre retraite.
- Départ anticipé : Si le rachat vous permet d’atteindre le taux plein plus tôt, vous pourrez partir avant l’âge légal sans subir de décote.
- Déduction fiscale : Le coût du rachat est déductible de vos revenus imposables, réduisant ainsi l’impact financier immédiat.
La prime de départ à la retraite : un droit à ne pas négliger
Conditions d’éligibilité
Pour bénéficier de la prime de départ à la retraite, vous devez remplir ces critères :
- Avoir au moins deux ans d’ancienneté auprès de votre employeur.
- Ne pas avoir été licencié pour faute grave ou lourde.
- Prendre votre retraite à taux plein.
Calcul de la prime
Le montant de la prime est calculé sur la base de votre rémunération et de votre ancienneté :
- 2/10e de la moyenne des 6 meilleurs mois de salaire par année d’ancienneté.
- À cela s’ajoutent les congés payés non pris et les éventuels soldes de compte épargne temps.
Difficultés rencontrées dans certains départements
Dans la fonction publique territoriale, certains départements contestent l’application de l’indemnité de départ à la retraite, ce qui peut entraîner des situations complexes pour les assistants familiaux. Si vous vous retrouvez dans ce cas, voici les démarches possibles :
1. Engager une procédure amiable et judiciaire
Avant toute action, il est recommandé de tenter une conciliation amiable :
- Procédure amiable : Adressez-vous au service PMI de votre département pour solliciter une discussion.
- Action judiciaire : Si aucune solution n’est trouvée, vous pouvez saisir le tribunal administratif à condition de réunir toutes les conditions légales pour prétendre à cette indemnité. Pour maximiser vos chances, il est conseillé de vous faire accompagner par un avocat spécialisé.
Important :
- En cas de rejet par le tribunal administratif, vous avez la possibilité de faire appel devant la cour administrative d’appel, puis, en dernier recours, de saisir le Conseil d’État.
- Attention toutefois, l’issue n’est pas garantie. Dans certains jugements, comme celui du tribunal administratif de Limoges, le Conseil départemental a été reconnu dans son bon droit.
2. Renoncer à l’agrément pour obtenir une indemnité de licenciement
Si l’indemnité de départ à la retraite n’est pas versée et que le recours judiciaire semble incertain, vous pouvez opter pour le renoncement à votre agrément :
- Procédure de renoncement : Adressez une lettre recommandée avec accusé de réception au président du Conseil départemental via le service PMI, informant de votre décision de renoncer à votre agrément.
- Effets du renoncement : Ce retrait d’agrément entraîne une obligation de licenciement de la part de l’employeur. L’indemnité de licenciement versée dans ce cas est calculée de la même manière que l’indemnité de départ à la retraite.
Avantages du renoncement à l’agrément :
- Paiement de deux mois de préavis, du reliquat des congés payés et du solde du compte épargne temps éventuel.
- Sécurisation des droits, car l’indemnité de licenciement est juridiquement inattaquable.
Points de vigilance lors de cette procédure
- Délai et courrier de renoncement : Certains départements font traîner les procédures de licenciement après le retrait d’agrément, ou tentent d’assimiler le renoncement à une démission. Sachez qu’un retrait d’agrément n’équivaut pas à une démission.
- Convocations à un entretien préalable : Bien que non justifié, certains employeurs convoquent les assistants familiaux à un entretien préalable au licenciement pour essayer de les convaincre qu’ils ne peuvent bénéficier d’un licenciement. Il est fortement conseillé de ne pas répondre à ces convocations.
Pour éviter tout écueil dans ces démarches complexes, il est fortement recommandé de contacter votre syndicat FAFPT local. Celui-ci pourra vous accompagner, vous conseiller et défendre vos droits face aux employeurs ou à l’administration.
Les démarches administratives essentielles
Préparer votre demande de retraite
Quand faire sa demande ?
La demande de retraite doit être déposée quatre mois avant votre date de départ prévue. Ce délai est indispensable pour permettre aux organismes de traitement d’examiner votre dossier et de valider vos droits.
Les étapes pour déposer votre demande
- Connectez-vous à votre espace personnel sur lassuranceretraite.fr.
- Remplissez le formulaire en ligne et téléchargez les pièces demandées : carte d’identité, justificatifs d’activité, relevé de carrière, etc.
- Une fois la demande validée pour le régime de base, effectuez vos démarches auprès de l’IRCANTEC pour la retraite complémentaire.
Le cumul emploi-retraite : une opportunité encadrée
Le cumul emploi-retraite (CER) est un dispositif permettant aux retraités de poursuivre une activité professionnelle tout en percevant une pension de retraite. Pour les assistants familiaux, ce mécanisme peut être une solution intéressante, sous certaines conditions.
Les deux cadres du cumul emploi-retraite : libéralisé et plafonné
Selon une réponse à la Question écrite n°11264 au Sénat, publiée au Journal Officiel, le CER est possible dans deux configurations distinctes :
Cumul emploi-retraite libéralisé (sans plafonnement des revenus)
Cette option permet de cumuler intégralement les revenus de votre activité professionnelle et votre pension de retraite, sans restriction. Pour en bénéficier, vous devez remplir les conditions suivantes :- Avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite, fixé à 62 ans pour les générations nées après 1955.
- Liquider votre pension de retraite à taux plein, soit en raison de la durée d’assurance requise, soit en atteignant l’âge du taux plein automatique (67 ans).
- Avoir liquidé l’ensemble des pensions de retraite (de base et complémentaires) auxquelles vous avez droit.
Cumul emploi-retraite plafonné (avec limitation des revenus)
Si vous ne remplissez pas les conditions du CER libéralisé, vous pouvez tout de même cumuler emploi et retraite, mais dans la limite d’un plafond de revenus :- Le plafond correspond soit à 160 % du SMIC (soit 2 882,88 € par mois en 2025), soit au montant du dernier salaire brut d’activité perçu avant la liquidation des pensions.
- Dans ce cas, il est obligatoire de respecter un délai de carence de six mois avant de reprendre une activité chez le même employeur.
Ce plafonnement vise à permettre aux retraités qui n’ont pas une carrière complète de compléter leurs revenus tout en évitant qu’ils ne liquident prématurément leur pension sans atteindre le taux plein.
Dérogation spécifique pour les assistants familiaux
La circulaire n° 2009/45 du 10 février 2009 a confirmé que les assistants familiaux et assistants maternels bénéficient d’une dérogation permettant de poursuivre leur activité professionnelle dans le cadre du CER libéralisé, sans appliquer le délai de carence de six mois. Cette position a été appuyée par plusieurs rapports parlementaires, notamment celui de M. Denis Jacquat pour l’Assemblée nationale et de M. Dominique Leclerc pour le Sénat, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Attention : Une jurisprudence récente, notamment l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 28 mai 2018, a remis en question cette dérogation en jugeant que le délai de carence s’applique également au CER libéralisé pour les assistants familiaux. Cependant, cette décision n’a pas été confirmée par le Conseil d’État, et le Gouvernement continue d’affirmer que le délai de carence ne s’applique pas dans ce cadre.
Résumé des avantages pour les assistants familiaux
- Les assistants familiaux peuvent continuer à exercer leur métier tout en percevant leur retraite.
- Le CER libéralisé reste la meilleure option pour éviter les contraintes liées au plafonnement des revenus ou au délai de carence.
Après la retraite : droits et options
Continuer son activité après la retraite
Cumul emploi-retraite et continuité d’accueil
Comme mentionné précédemment, les assistants familiaux peuvent continuer à accueillir des enfants même après la liquidation de leur pension, sous réserve des règles en vigueur.
Cependant, si vous choisissez cette option :
- L’indemnité de départ à la retraite n’est pas versée tant que vous continuez à exercer. Cette prime n’est liée qu’à une cessation complète d’activité.
- Vos revenus cumulés (pension + salaire) peuvent avoir un impact sur votre fiscalité, notamment si vous êtes en CER plafonné.
Possibilité de reconversion ou de bénévolat
Après une carrière exigeante en tant qu’assistant familial, vous pourriez envisager :
- Une reconversion dans un domaine connexe : Par exemple, le soutien familial, l’éducation ou l’accompagnement social.
- Des activités bénévoles : Ces engagements permettent de continuer à utiliser vos compétences au service des autres sans contraintes professionnelles.
La pension de réversion : protéger vos proches
La pension de réversion permet au conjoint survivant de percevoir une partie de la retraite de l’assistant familial après son décès. Elle est soumise à des conditions différentes selon qu’il s’agit de la retraite de base ou de la retraite complémentaire.
Pour la retraite de base
Dans le cadre du régime général (CNAV/CARSAT), la pension de réversion est soumise à un plafond de ressources annuelles :
- 24 232 € pour une personne seule.
- 38 771,20 € pour un couple (chiffres 2024).
Le conjoint survivant doit également remplir d’autres critères, notamment être marié avec le défunt au moment du décès (les partenaires PACS et concubins ne sont pas éligibles).
Pour les retraites complémentaires (IRCANTEC, AGIRC-ARRCO)
Les pensions de réversion des régimes complémentaires bénéficient de règles plus souples :
- Pas de plafond de ressources : Contrairement à la retraite de base, les revenus du conjoint survivant n’affectent pas l’attribution de la pension de réversion.
- Montant de la réversion : Généralement fixé à 50 % de la retraite complémentaire du défunt.
Ces dispositions assurent une meilleure sécurité financière au conjoint survivant. Si vous souhaitez optimiser vos droits ou avez des questions, rapprochez-vous de votre caisse de retraite ou du syndicat FAFPT local pour un accompagnement personnalisé.
Conclusion
La préparation de la retraite des assistants familiaux est une démarche qui exige de l’anticipation, une compréhension fine des règles en vigueur, et une gestion méthodique des étapes administratives. Ce guide vous a accompagné dans les principales étapes : compréhension des régimes de retraite, préparation des démarches, maximisation des droits, gestion du cumul emploi-retraite, et exploitation des options après la retraite.
Pour vous accompagner dans toutes ces démarches, n’hésitez pas à solliciter le soutien de la FAFPT ou de ses syndicats locaux. Le syndicat peut vous fournir des conseils personnalisés, vous aider à résoudre des litiges administratifs, et défendre vos droits face à des employeurs ou des caisses de retraite.